mardi 19 janvier 2010

BUZZ-MOI | AURÉLIA AURITA

BUZZ-MOI | Aurélia Aurita | Les Impressions Nouvelles

Souvenez-vous, en mars 2006, une petite BD impudique et pleine fraicheur sortait et créait son petit effet, non seulement dans le milieu de la BD, mais aussi (et surtout) dans les "grands médias". Trois ans après la sortie de "Fraise et Chocolat", et bien qu'ayant donné une suite à son ouvrage, Aurélia Aurita n'a jamais capitalisé sur les aspects les plus vendeurs de son ouvrage phare (l'érotisme), et préfère aujourd'hui produire un ouvrage parlant de la réception médiatique, critique et public de "Fraise et Chocolat" plutôt que d'en refaire une pâle copie.

Toujours aussi vivace et productive (elle a signé l'an passé son meilleur ouvrage, le très Orwelien "Je ne verrai pas Okinawa"), Aurélia Aurita revient donc dans "Buzz-Moi" sur l'enchainement des événements qui ont faits d'elle en quelques mois une des grandes figures de la BD francophone. En une dizaine de chapitres, elle dresse le portrait d'un monde médiatique avide de nouveauté mais avare de temps qu'il consacre aux œuvres, papillonnant de "buzz" en "buzz", jamais à un raccourci près. Dans l'autofiction d'Aurélia, la franchise a toujours été une valeur incontournable, qui s'applique aussi bien à son entourage, aux événements qu'elle décrit qu'à elle-même. Il n'y a qu'à voir avec quelle simplicité (et quelle économie de moyen) elle décrit l'agaçante fausse nonchalance d'un Frédéric Beigbeder qu'elle rencontre lors de son passage au "Grand Journal" sur Canal +. La journaliste de "Elle" qui n'a pas lu le livre mais pour qui "ça n'a aucune importance" en prends aussi pour son grade. Entre l'obligation implicite de devoir promouvoir son livre, répondre aux attentes de son éditeur et son besoin de préserver à tout prix son intégrité, on découvre une nouvelle facette du double fictionnel d'une Aurélia Aurita qui se demande comment gérer sa carrière, garder la tête froide, mais surtout garder son calme face à des journalistes qui ne veulent voir dans ses œuvres polissonnes que l'œuvre d'une petite exhibitionniste de service. "Buzz-moi" offre quelques pistes de réfléxions qui sont autant de conseils aux jeunes (encore plus jeunes) auteurs qu'une pertinente critique du grand cirque médiatique.
(Chronique parue dans le supplément culturel
du quotidien
suisse LE COURRIER)

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